A la découverte des plantes sauvages comestibles – avec Isabelle Lagarde

Dimanche dernier avec ma louloutte nous avons fait notre première sortie à la rencontre des simples. Accompagnée par Isabelle Lagarde, une spécialiste de la biodiversité végétale, nous avons passé deux heures à scruter les plantes sauvages comestibles aux abords de la Pimpine et de l’étang des sources, pas loin de chez nous.

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A la fraîche

Il fait frais en ce dimanche matin, mais l’humidité est concurrencée par d’agréables rayons d’un soleil qui depuis trois jours a disparu sous le gris d’un temps d’automne normal. Mon Delou et moi sommes ravies de rencontrer Isabelle : avec trois autres « stagiaires », nous allons passer deux heures à décrypter la richesse du végétal qui nous entoure. J’aimerais, peu à peu, arriver à lire et décrypter ce vert qui nous entoure et dont j’ignore tout, ou presque. Prendre le temps de regarder, reconnaître, toucher, et même goûter si cela est possible. Apprendre à mieux observer, discerner, et éventuellement utiliser ce qui se trouve à portée de main. Ma fille a toujours été en demande pour sa part, et ils font des sorties nature toutes les semaines avec sa maîtresse : l’idée de partager ensuite ce qu’elle apprend avec sa classe la motive donc d’autant plus. Puis nous sommes heureuses de partager ce moment toutes les deux aussi, il faut le dire, en apprenties sorcières !

Pendant deux heures, nous circulons dans un rayon d’une centaine de mètres tout au plus. L’exploration démarre à nos pieds, à portée de main : première plante sur laquelle nous nous arrêtons, l’ortie, un « légume » disponible toute l’année. Cette plante date de la préhistoire et si elle pique, c’est parce qu’elle a appris à se défendre nous explique Isabelle en saisissant une branche à pleine main : je commence à avoir mal pour elle quand elle nous explique que nous ne sommes pas tous sensibles à l’histamine contenue dans ses poils urticants. Je veux bien le croire tant je réagis quand je m’y frotte ! Et si ce système de défense est justement conçu pour se protéger des herbivores, il est conseillé de ne consommer que les feuilles et les pointes, car sa fibre (utilisée autrefois dans l’industrie textile) est sacrément solide. Une fois blanchie dans l’eau bouillante, elle peut être utilisée en cuisine – Isabelle recommande la purée de pomme de terre parfumée à l’ortie d’ailleurs. Mais c’est surtout « l’une des meilleures plantes à l’état naturel » nous explique-t-elle. Dans la vidéo suivante, de la chaîne Youtube « Le chemin de la nature », on la qualifie même de reine des plantes sauvages :

Nous poursuivons avec la bardane : de large feuilles qui me rappellent la rhubarbe, et que nous connaissons pour ces petites fleurs qui ont inspiré le Velcro. Vous savez, ces petites boules qui s’accrochent à nos vêtements et avec lesquelles nous jouions petit.es ? En fait, les racines de bardane sont comestibles avant que la tige centrale ne se développe. Elles ont un goût d’artichaut paraît-il.

Place ensuite à la carotte sauvage, plante dont nous avons récemment entendu parler dans les médias en raison du décès d’un jeune homme qui avait consommé une plante de cette famille botanique qui s’est avérée être de la cigüe. Isabelle en profite alors pour nous rappeler à quel point il faut être prudent : on trouve de tout de la nature, des bonnes et des moins bonnes, des toxiques à très court terme, des toxiques si consommée à forte dose, etc. Il faut surtout être sûr de soi : au moindre doute on ne consomme pas. Dans le cas de la carotte sauvage, il s’agit d’une famille botanique compliquée et potentiellement dangereuse donc, si on se trompe les conséquences peuvent être fatales… Ce tutoriel pour les différencier est assez complet.

Vient ensuite le plantain, dont il existe plusieurs familles là aussi – à feuille ovales assez grandes (dit « Majeur », dont le suc peut calmer les piqûres d’ortie – à retenir ! – et qu’on utilisait aussi autrefois dans les sabots, sous la voûte plantaire) ou le plantain lancéolé, dont les feuilles sont plus grandes et plus fines. Et dont les jeunes pousses et les fleurs se mangent à peu près tout le temps ! Cela a un goût de champignon quand les fruits sont bien verts, et c’est un délice apparemment dans les salades. Je vous mets là aussi une vidéo de Chemin de la nature, très bien faite pour retrouver ces informations :

Des trésors en veux tu en voilà

On lève la tête ensuite pour se tourner vers l’Aubépine : ses fruits rouges ont ramolli avec le froid et l’humidité, c’est le bon moment pour ramasser les cenelles et confectionner des confitures ! Nous les goûtons avec Adèle, le goût est très fin, le noyau tout petit, mais ce n’est pas une saveur commune de nos jours, nous l’avons oubliée… et mon Delou s’est juste retournée pour la recracher 😉 Isabelle conseille d’ailleurs de l’utiliser avec d’autres fruits si on souhaite en faire des confitures.

Je découvre ensuite la menthe aquatique, forcément proche des cours d’eau tant elle pousse sur terrains humides. Il faut savoir que la menthe s’hybride très facilement, et aussi en existe-t-il de multiples variétés mais l’aquatique est apparemment l’une des meilleures en infusion. J’ai prélevé deux pieds (il y en avait masse !) pour en planter dans le bas de notre terrain, près de la source…

Au détour d’une racine de benoîte, Isabelle nous fait respirer un doux parfum de clou de girofle (molécule d’eugénol), utilisé pour parfumer le lait à l’époque. On peut aussi la mettre dans le vin chaud a priori :

Nous découvrons juste à côté le lierre terrestre : situé généralement dans les sous-bois, il court au sol. Utilisé en aromate, il se mange frais ou séché et prend du goût avec le temps nous explique Isabelle.

Place ensuite au sureau noir : nous sommes en fin de saison certes et ne trouvons plus de fruit sur l’arbuste que nous croisons, mais notre guide nous explique la nuance entre celui qui est comestible (il fait du bois) et celui qui est toxique. Sachant, nous précise-t-elle, que les fruits de sureau ne se mangent jamais crus, mais toujours cuites en gelée ou en confiture. Isabelle conseille d’ailleurs de couper les ombelles avant d’utiliser un peigne à cheveux pour récupérer les baies !

Nous tombons enfin sur des pissenlits, qui comme les orties se consomment à peu près tout le temps, que sa fleur soit verte (au goût plutôt amer) ou jaune (alors plus douce). Durant le confinement je me souviens que nous en avons ramassé des feuilles pour faire une quiche et quelques soupes, c’était pas mal, mais là encore l’herbaliste de la chaîne Le chemin de la nature explique ses différents usages, en suggérant même de consommer les racines grillées à la poêle :

Isabelle nous fait ensuite goûter à l’angélique des bois, très savoureuse. Cette plante ombellifère est là aussi compliquée à reconnaître donc en cas de doute il vaut mieux s’abstenir.

Puis au milieu d’un autre massif d’orties nous découvrons le lamier tâcheté : issu d’une famille identique à la menthe, il n’est pas doté de système de défense et se protège donc en s’installant à côté des orties. Ses feuilles marquées de blanc et ses fleurs violettes en font une plante facile à reconnaître. Cela est plutôt utile quand on sait que ses feuilles comme ses fleurs se mangent en condiment ou en potage.

Semer, essaimer

Si Isabelle est une passionnée qui nous a partagé de nombreuses autres connaissances que je ne détaille pas ici, nous avons vraiment apprécié sa façon de nous embarquer et de nous partager ses savoirs. Adèle et moi nous sentons riches d’une grille de lecture un peu plus complète de notre environnement proche, et désireuses d’explorer plus encore.

Au retour, ma fille a envie de conserver quelques unes des feuilles que nous avons ramassées : ça tombe bien, nous sommes en plein déménagement et dans les cartons pour cause de travaux qui commencent demain dans la maison et je viens de retrouver mon herbier de petite fille ! Je lui explique comment ça marche, et en un rien de temps elle est partie ajouter d’autres spécimens de feuilles trouvés dans le jardin et sur notre terrasse, voyez plutôt si ça n’est pas mignon 🙂

Elle a pu partager cela avec ses camarades de classe mardi, avant d’être suivie par d’autres qui sont venues également avec leur herbier ce vendredi. De quoi semer des graines de passion et d’envie on dirait…

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