Avec « Classe dehors », plus d’excuse pour ne pas enseigner au vert et au grand air

« Changer la posture éducative », « avoir une approche transversale », « se rendre compte des bénéfices annexes », « réaliser que cela permet une meilleure concentration et meilleure mémorisation », etc. tels sont quelques uns des bénéfices mis en avant lors du zoom de lancement du site Classe Dehors, initié par un vaste collectif de structures nationales issues du milieu enseignant, de l’éducation populaire, de l’éducation à la nature et à l’environnement, des parents d’élèves et des collectivités (notamment Faire Ecole Ensemble, Tiers Lieux Edu, Profs en transition, la Ligue de l’enseignement, l’Unaf, la FCPE, la FCPN, le FRENE (ex REN), les CEMEA.) ce mercredi 5 mai 2021.

Le concept, d’ores et déjà appliqué dans certaines écoles de l’Hexagone, est largement répandu dans nombre d’écoles à l’étranger (sur ce point lire l’excellent ouvrage de Moïna Fauchier-Delavigne, journaliste spécialiste de l’éducation au journal Le Monde et co-auteure avec Matthieu Chéreau de L’enfant dans la nature : pour une révolution verte de l’éducation, Fayard (2019)). Mais avec la pandémie, la logique du « tout numérique » s’est largement appliquée au monde scolaire. Une situation dénoncée par les fondateurs de Classe Dehors : « Depuis le début de la pandémie, les enfants, qui sont peu touchés directement par la Covid, en paient pourtant les conséquences : le temps passé devant les écrans a explosé, ils sont isolés et privés de nature, les apprentissages sont mis à mal, la sédentarité s’aggrave, les symptômes de dépression augmentent, etc. »

En enseignant de dehors, les enseignants ont la possibilité de palier ces effets négatifs du confinement, mais aussi de développer d’autres approches pédagogiques : « Enseigner dehors permet de travailler les apprentissages fondamentaux, de lutter contre le décrochage mais aussi de développer les compétences cognitives et psychosociales, la motricité, la résilience (cf. « Les bénéfices sur la santé mentale des interactions d’enfants et d’adolescents avec la nature : revue systématique », Epidemial Community Health, 2018, NDRL), de réduire le stress et de favoriser la découverte de la biodiversité. L’école dans la nature est non seulement possible, mais très bénéfique pour les enfants, cela a été largement validé par des centaines d’études. Aujourd’hui plus personne ne remet en question son intérêt » ajoute encore le collectif Classe Dehors.

Aussi cette fédération inédite d’acteurs souhaite-t-elle apporter une autre réponse au mal être des enfants et à la crise de l’école : pour Moïna Fauchier Delavigne, « on ne peut plus confiner l’école pour lutter contre le covid-19. Il y a une urgence sociale, sanitaire et éducative à développer la classe dehors. Encourager les enseignants à sortir ne suffit pas. Il faut maintenant aider concrètement tous ceux qui le veulent à se lancer ».

Pour cela, la plateforme lancée ce soir entend proposer nombre de ressources et référencer des initiatives destinées à soutenir les enseignants qui veulent commencer à faire l’école dehors. Il s’agit, pour le collectif, de poser ainsi la première brique d’une mobilisation nationale beaucoup plus vaste pour diffuser « la classe dehors » et permettre qu’elle soit pratiquée le plus souvent possible.

« Faire cours dehors, c’est créer un autre lien avec nos élèves »

Cette pratique pédagogique connaît un nouvel essor en réponse à la crise sanitaire. « Depuis la fin du premier confinement, l’amplification d’un mouvement au sein de la communauté éducative est en train de se faire connaître auprès du grand public : des enseignants pionniers osent sortir de l’école pour faire classe » expliquent les membres de Classe Dehors, qui insistent sur le fait que cela peut se faire à la ville comme à la campagne, dans des espaces de nature proches de l’établissement – parc, square, forêt…-  ou même dans la cour de récréation !

Lors du zoom, plusieurs enseignants déjà adeptes de l’école dehors témoignent : « en faisant Classe Dehors, il y a chez les élèves et les enseignants un changement de posture selon moi. On peut imaginer que les enseignants passent d’une unique intention pédagogique à une attention sur ce qui se joue chez les élèves quand ils sont au dehors » témoigne l’une des participant-e-s. « Attention à ne pas seulement transposer la « classe » en extérieur, c’est passer à côté de beaucoup de choses », avertit un autre pendant que d’autres rappellent à quel point les enfants acteurs, de surcroît dans la nature, se concentrent et retiennent beaucoup mieux. « Cela leur apprend à ne pas considérer l’extérieur comme un décor, mais bien comme un milieu vivant , porteur de sens, de richesses, et l’aborder avec ses sens, pour développer la curiosité, l’attention, l’ouverture. Puis ensuite le connaître par ses significations. Savoir lire, écouter pis comprendre. C’est une approche empirique et déductive du monde« .

Avec le site lancé ce 5 mai 2021, les enseignants auront de quoi accéder à :

+ une cartographie participative et évolutive, pour rendre visible ceux qui pratiquent déjà la classe dehors et faciliter la mise en relation avec ceux qui se lancent

+ un espace ressources mutualisé, sous licence libre, où chacun peut contribuer, avec des réponses concrètes pour commencer, des exemples de pratiques et d’activités

+ un agenda partagé de webinaires : pour se (re)connaître, répondre à toutes les questions, présenter les outils et permettre le partage d’expériences et le recueil de témoignages

De quoi nourrir une dynamique qui s’inscrit dans la continuité de la publication de deux tribunes signées de nombreux enseignants, médecins, chercheurs et élus publiées dans Le Monde (le 27 avril 2020) et dans Libération (le 18 février 2021) « Nous sommes conscients que les bénéfices d’un accès régulier à la nature ne sont pas limités au cadre scolaire et qu’en petite enfance aussi, une telle démarche serait très utile, comme dans les hôpitaux et les Ehpad ». Pour benjamin Gentils, membre du collectif, « dans un moment de crise sans précédent, la continuité d’un service public essentiel qu’est l’école ne pourra se faire sans la mobilisation de toutes les bonnes volontés issues de la société civile ! »

++ Pour aller plus loin ++

+ Le tutoriel pour utiliser le site Classe Dehors

+ Le Manuel de l’école du dehors

+ Les conseils du réseau Canopée et les essentiels pour faire classe dehors ou encore les lieux où se rendre

+ Un guide pédagogique développé pour les enseignants, au Canada

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