Vies-à-vies : la chaîne Youtube qui donne à voir la vie d’un territoire de jour comme de nuit

Que se passe-t-il sur le chemin, le bord de rivière, le pré derrière chez nous, lorsque nous ne sommes pas là ? C’est pour répondre à cette question que Nicolas Gaidet-Drapier a eu l’idée de créer une web-série qui nous immerge dans toutes les formes de vies qui habitent un lieu donné. Eclairage sur une démarche pleine de sens.

L’idée, simple et efficace, est réalisée avec soin : au fil des saisons, on découvre l’ensemble des habitants, humains et non-humains, qui se partagent un lieu donné. Prenez les deux vidéos suivantes, réalisées durant les mois de février et mars (les plus novices apprécieront les détails indiqués sous la vidéo) : mixant images diurnes et nocturnes, on voit tour à tour des bipèdes en baskets, en bottes ou à roue se promener sur des espaces tout autrement investis la nuit (et de temps en temps le jour aussi.)

L’objectif : « Prendre conscience de ce monde vivant qui nous entoure… Renouer le contact avec nos voisins… S’interroger sur notre manière de vivre ensemble… » précise la description de la chaîne lancée en novembre 2020.

Pour Nicolas Gaidet-Drapier, son fondateur, il s’agit d’ « essayer de passer le message qu’il y a de la faune partout : on est voisin, on partage l’espace, on est ensemble et nous pouvons y faire plus attention ».. Il faut dire que ce docteur en écologie de formation est depuis longtemps habité par les questions de coexistence et d’interactions entre activités humaines et vie sauvage. Spécialiste de la gestion de la grande faune en Afrique, il a aussi travaillé sur la santé animale pendant dix ans, avant de reprendre les études : « je ressentais une frustration quand je voyais la manière dont les politiques publiques prennent ces questions en charge, et aussi ai-je suivi un master en politique pour travailler sur les mêmes problématiques, mais avec un angle différent ». Il travaille maintenant sur ces questions d’interactions avec une vision plus large, pour voir comment l’action publique peut prendre ça en charge. Ses travaux académiques, menés avec un ensemble d’autres chercheurs du Cirad font appel à une multitudes de disciplines afin d’étudier les socio-éco-systèmes.

Grand utilisateur de pièges photos, au départ en Afrique, il s’est amusé à en poser près de chez lui pour observer le retour de certains animaux (loutre, castor…). Inconvénient de ces pièges : ils se déclenchent dès que quelque chose passe devant. Aussi a-t-il mûri son envie à force de voir des gens passer devant, en plus des espèces dont il était à la recherche. « Cela faisait longtemps que je voulais travailler sur un projet hors sphère académique, pour sortir de notre monde de chercheurs et aller dans la sphère publique, faire des sorties natures pour les enfants, etc. Avec cette chaîne, j’ai envie de toucher un plus grand public avec l’intention de montrer que la biodiversité n’est pas que la grande faune dans les zones sauvages avec des ours polaires ou des éléphants » indique-t-il, également désireux de montrer qu’il n’y a pas de ségrégation, de séparation physique et géographique, entre ces animaux et nous.

Situé non loin du Pic-Saint-Loups (que les connaisseurs reconnaîtront sur l’image placée à la fin de chaque vidéo – cf. image ci-dessus), le chercheur-passeur installe son dispositif dans des sites facilement reconnaissables, pour que chacun se familiarise avec cette idée, à l’échelle d’un territoire ainsi cartographié. Au fil des saisons, la succession d’images de faune et de personnes filmées en cadre fixe sur les mêmes sites devient familière. « Nous sommes tout proche d’une réalité que nous ignorons la plupart du temps », précise celui qui choisit de ne pas commenter et laisser l’image parler d’elle-même afin d’éviter les postures moralisatrices. « Je veux partager ces images, faire passer le message de manière discrète qu’on vit tous ensemble, qu’on doit cohabiter de manière pacifique, en partageant les ressources, j’ai envie que l’information circule, je veux toucher un public plus large que les naturalistes ou les personnes déjà sensibles à ces sujets » ajoute-t-il, désireux de transmettre ce qu’il ressent lorsqu’il fait un affût, quand tout se passe de commentaire et passer par le sensoriel et l’émotionnel. « On sent le vent, on entend les grillons, ça rend le moment important, fort… ça passe par un autre canal, c’est physique, émotionnel, et avec des images je pense qu’on peut recréer une partie de ces sensations ».

Une chose est sûre : si sa chaîne n’est pas encore très connue, elle mérite de l’être tant sa volonté d’interroger la manière d’habiter sur un même territoire est d’actualité pour l’avenir de notre vivre ensemble… N’hésitez donc pas à faire passer le message !;)

Voilà ci-dessous la playlist complète, régalez-vous bien !

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